Premier
voyage en Chine, septembre-novembre
2002.
Décollage
ici.
Expérience
précédente : The Lijiang Experience (Pt. 3).
07
octobre 2002 – 02 novembre 2002 : The Lijiang Experience,
Lijiang (Yunnan).
Quatrième
jour. Enfin, je me sens reposé. Je m'en vais, c'est décidé,
découvrir ce que mon Lonely
Planet annonce être les deux
« institutions » de Lijiang : le Sakura Café et le
Prague Café. Le premier me laisse complètement indifférent, mais
le Prague Café ! Situé au bord d'un canal, à côté d'un
adorable pont, le Prague Café est un lieu clair, chaleureux et
intimiste. Je m'y sens tout de suite chez moi. Tout est en boiseries,
les murs recouverts d'étagères chargées de livres en anglais et en
chinois. Il y a bien sûr un bar américain, lui aussi en bois, et
six tables, ni plus ni moins : deux grandes et quatre petites.
Derrière le bar, d'autres étagères avec toutes sortes de bocaux et
de bouteilles. La devanture est quant à elle une baie vitrée,
flanquée d'une porte coulissante à la mode japonaise. Le lieu est
animé par trois serveuses chinoises, auxquelles s'ajoutent un
cuisinier naxi, une femme de ménage, deux chiens (un grand et un
petit) et deux chats (la mère et son bébé). Tout comme j'étais
loin d'imaginer, en venant à Lijiang, l'histoire d'amour que je
vivrai avec cette ville, je suis encore loin d'imaginer celle que je
vivrai avec le Prague Café… Je note pourtant que « je crois
avoir trouvé l'endroit paisible que je cherchais, où passer mes
soirées à écrire » et comme pour me conforter dans cette
idée, la serveuse met l'album Ten
Summoner's Tales de Sting,
que j'affectionne tout particulièrement. J'écris quatre heures
d'affilée et termine le scénario d'Épeira
(je le réécrirai je ne sais combien de fois par la suite). Une
musique incantatoire démarre alors, me titille peu à peu les
oreilles. Au bout de quelques titres, je me demande quel peut être
ce disque, qui exprime avec exactitude le spleen de l'écrivain qui
se laisse aller, un verre de vin rouge à la main, à la solitude
nocturne au cœur d'une grande ville endormie. Et c'est ainsi que je
tombe amoureux de la bande originale de The
Million Dollar Hotel de Wim Wenders, qui deviendra l'un de mes disques de chevet. Á
minuit et demi, le bar ferme et je me retrouve à la porte de ma
guesthouse :
c'est tout honteux que je dois réveiller la maîtresse de maison
afin qu'elle m'ouvre la porte (l'incident se reproduira à quelques
reprises). Avant de m'assoupir, j'écris les paroles de la chanson
Kazz
(inédite) et je continue de revisiter les dix-sept mois qui ont
séparé l'Inde de la Chine.
Photo : Dr. Ma Pingke |
L'été
2001 avait été doux comme un entre-deux. Comme chaque été, je
m'étais mis en retrait pour faire le point. La Québécoise était
entrée dans ma vie aux derniers jours de juin pour en ressortir aux
premiers jours de septembre. Amourette d'été sans incidence, sur
fond de la jeune fille aux yeux de miel qui hantait toujours mon cœur
en dépit du bon sens. Il y eut quelques escapades, notamment au
festival d'Aurillac où j'écrivis Expérience du Désert
avec six mois de retard, ainsi que deux courts séjours à Marseille.
Ce fut l'occasion de jeter les cendres de ma mère dans la
Méditerranée, puisque c'était ce qu'elle souhaitait. Le vent manqua
de peu de transformer la scène en remake de The
Big Lebowski,
mais je me repris juste à temps et évitai le désastre.
La jeune fille aux yeux de miel était là, elle m'avait accompagné.
Je dis adieu à ma mère et pleurai dans ses bras. L'extrême de
notre brève histoire d'amour avait été mêlé de si près à celui
de la mort de ma mère qu'il était logique de clôturer les deux
récits de la sorte. En effet, la jeune fille aux yeux de miel
était bel et bien passée à autres
choses,
au pluriel, et elle me contait par le menu ces escapades
sexuelles. De retour à Lyon, je me résolus enfin à admettre que je
n'étais pas encore capable d'être ce genre-là de confident, et
qu'il valait mieux prendre mes distances quelque temps. J'écrivis
Mon nom n'est pas Tantale
afin de graver cette décision dans le marbre. Découvrant
ce texte, mon amie Caroline eRre dira « c'est mortel ! »
(ça l'était) puis, après une pause, « tu veux c'que tu veux
pas ». Tout était dit.
Prochaine
expérience : The Lijiang Experience (Pt. 5).
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