27 juin 2008

Frederic W. Taylor

(elle)
- J’aimerais te dire un truc qui risque de te blesser…
(lui)

- Alors ne dis rien ! Par pitié ne dis rien !

(elle)

- J’aimerais te dire un truc qui pourrait nous éloigner l’un de l’autre.
(lui)

- Pourquoi faire ? N’y en a-t-il pas déjà assez ?

(elle)

- J’aimerais te dire un truc mais ça va te mettre en colère.
(lui)
- Tout cela est contre-productif…

25 juin 2008

Le meilleur groupe du monde... et personne ne l'a su !

Qui se souvient encore de Novo Navis ?

Et pourtant…

Retour en 1999 : après un EP remarquable (Back!, paru sous le nom de Navis), le trio Novo Navis, composé de deux Français et une Japonaise, envoyait dans les bacs une petite perle nommée Populations : un album « polyglotte » (Français, Anglais, Japonais) qui devait connaître un cuisant échec commercial et être oublié tout aussi vite.


Et pourtant…

Des centaines de disques que j’ai achetés et téléchargés dans ma vie, Populations restera toujours l’un des plus marquants. Je suis littéralement, à l’époque, tombé fou amoureux de cet album. Près de dix ans plus tard, je l’écoute toujours avec le même émerveillement. Alors oui, c’est un coup de cœur perso, mais au delà de ça je crois que Populations est l’une des plus tragiques histoires de flop de l’industrie musicale française. Parce que, comment dire… il se passait vraiment quelque chose de spécial.

Novo Navis était un groupe difficile à catégoriser : globalement electro (mais quel sens a encore ce mot ?), instrumental et vocal à la fois, un penchant assumé pour la house music, un humour constant, un son un peu étrange, décalé et pourtant en phase avec son époque… Populations est une toile d'araignée musicale eclectique mais cohérante. Tout commence avec trois titres assez trip-hop, portés par des mélodies vraiment exceptionnelles, suaves et envoûtantes. Puis Populations bascule dans des expérimentations pop fantaisistes, un peu dandy, où se mêlent machines et guitares sèches (c’était avant Mirwais) ; vire à une house indo-bollywoodienne ponctués de commentaires hilarants sur la faune des îles Galapagos ; enchaîne avec une techno de free-party ; se calme le temps d’un long interlude folk et planant ; puis repart de plus belle avant de finir en beauté avec un instru electro-funk digne de Prince ou George Clinton (et glissée au milieu de tout ça : une reprise de… Robert Palmer !) Et puis il y a mon petit chouchou : Milles choses à faire. Une chanson sensible, qui faisait alors tant écho à ma vie de petit animal urbain, qui courait en tous sens et compensait le speed de la grande ville par un mélange de suractivité et de rêveries.

C’était début 2000, j’avais vingt-trois ans et j’ai découvert ce disque par hasard, vraiment par hasard. Il a bercé mes matinées et mes nuits pendant des mois, à cette époque où j’avais justement mille choses à faire. Populations m’a porté, réveillé, nourri, amusé et emporté, au point que je le considérais presque comme mon petit antidépresseur secret, un de ces chamallows musicaux, un peu comme Post de Björk et Big Calm de Morcheeba, mais en plus sportif (lol !).

Il y a les disques excellents, que l’on aime parce qu'ils le sont. Mais de temps à autre, rarement, il y a ces disques qui vous marquent, qui font partie de votre histoire et de celle de vos proches, qui vous emmènent loin et qui vous font vraiment, profondément, quelque chose. Populations fut pour moi de ceux-là.

Ignoré par ce monde ingrat, Novo Navis fut de ces groupes qui ne durent qu’un album et disparaissent. Il n’en reste aujourd’hui qu’un myspace posthume. Heureusement, ses trois membres ne se sont pas laissé abattre : la chanteuse Ai va désormais solo sous le nom de Ai-planet et ses mélodies n’ont rien perdu de leur magie. Quant aux deux autres compères, ils ont formé un nouveau groupe, Soda Pop Kid, qui distille une pop raffinée à la Scritti Politti.

Alors voilà : en 1999, Novo Navis était le meilleur groupe du monde, et Populations le meilleur album de l’année !

Jusque-là, personne ne le savait.

Maintenant, vous n’avez plus aucune excuse !

Liens :

Le myspace de Novo Navis.
Le myspace de Ai-planet.
Le myspace de Soda Pop Kid.
Populations (CD) sur Amazon.fr.

23 juin 2008

Une logique implacable

D'après Wikipedia :

« Raoul Villain, (…) est un nationaliste français, assassin de Jean Jaurès. (…) Après cinquante-six mois de détention préventive, il est acquitté lors de son procès, le 29 mars 1919, les jurés ayant estimé qu’il avait rendu service à sa patrie : « Si l’adversaire de la guerre, Jaurès, s’était imposé, la France n’aurait pas pu gagner la guerre. » La veuve de Jaurès doit même payer les frais du procès. »

Oui, ça c'est sûr : si on n'avait pas fait la guerre, on n'aurait pas pu la gagner ! Dans la foulée, si Hitler n'avait pas envahi l'Europe, nous n'aurions pas gagné la seconde guerre mondiale. Quel dommage que Hitler n'ait pas vécu pour être décoré à Nuremberg...

1914-1918 : seize à dix-huit millions de morts et plus de vingt millions de blessés pour entendre... ça !!! :-(

22 juin 2008

Justin Chien

Après La malédiction du plombier-garou, voici un second texte jeune public écrit fin 2005, un texte que j'affectionne tout particulièrement.

JUSTIN CHIEN

Voici Justin.
C’est un chien.
Justin Chien, donc.

Pauvre Justin.
Toi aussi, tu t’es fait avoir par son nom.
Ce n’est pas « juste un chien. » C’est « Justin Chien. »
C’est comme cela qu’il s’appelle.

Dans la ferme où il vit, Justin est le seul chien.
Il aime bien les poules et les moutons et les chats et les cochons et les vaches, mais…
Il aimerait bien avoir d’autres amis chiens.

A chaque fois que Justin se présente à un autre chien, il dit :
« Bonjour, je suis Justin Chien. »
L’autre comprend : « je suis juste un chien. »
Qui voudrait être l’ami de « juste un chien » ?

Quand un animal de la ferme le présente à un autre chien, il dit : « je te présente Justin Chien. »
Et l’autre chien répond, déçu, « Oh… C’est juste un chien. », puis il se détourne.

Qui voudrait être l’ami de « juste un chien » ?
Personne.
Parce qu’à la télévision, ils disent tout le temps qu’il faut être exceptionnel ! Et tout le monde croit ce que dit la télévision.
Alors, quand on est « juste un chien. »

Justin trouve que ses parents, monsieur et madame Chien, n’ont pas été très malins.
Ils auraient pu le nommer « Médor », ou « Rex », ou encore « Pyrame », comme tous les chiens.
Mais ils trouvaient que « Justin », c’était joli. Parce que c’était le prénom… d’un animateur de télévision.
Quelle erreur ils ont fait !

Justin est donc un chien très malheureux.
Les vaches essaient de le consoler en lui disant qu’il est très intelligent.
Les cochons essaient de le consoler en lui disant qu’il est très beau.
Les chats essaient de le consoler en lui disant qu’il est très grand et très fort.
Mais Justin veut des amis chiens, et une madame chien, pour lui tenir compagnie.

Un jour, Justin voit à la télévision qu’il faut se relooker, pour se faire des amis et être exceptionnel.
Alors Justin se teint la fourrure en rose.
Puis il va ainsi rencontrer les chiens du voisinage.
Et tous se moquent de lui : « Ha ! Ha ! Ha ! Un chien rose ! »

Un autre jour, Justin voit à la télévision qu’il faut être riche, pour se faire des amis et être exceptionnel.
Alors Justin vole de l’argent au fermier, et s’achète un collier en or.
Mais les chiens du voisinage sont jaloux du collier, et ils le regardent de travers.
Puis le fermier comprend comment Justin s’est offert son collier, alors il le gronde, et confisque le collier pour se rembourser.

Un autre jour, Justin voit à la télévision qu’il faut voyager, pour se faire des amis et être exceptionnel.
Alors Justin part seul sur les routes.
Il a froid et faim pendant une semaine, et revient tout maigre et tout sale.
Lorsqu’il va voir les autres chiens, tous trouvent qu’il a l’air d’un chien de gouttière et refusent de lui parler.

Un autre jour, Justin voit à la télévision qu’il faut bien parler, pour se faire des amis et être exceptionnel.
Alors il invente tout une série d’aboiements très sophistiqués, avec beaucoup de syllabes.
De telle manière qu’aucun chien ne comprend plus ce qu’il dit, et que tous le prennent pour un fou.

Décidément, Justin enchaîne les échecs. Un jour qu’il se confie à un jeune agneau, l’agneau rit et lui dit qu’il est bien naïf.
« Si les gens arrêtaient de croire les bêtises qu’on leur dit à la télévision, le monde se porterait bien mieux ! »
« Comment saurais-tu cela, toi qui n’est qu’un bébé mouton ? » répond Justin, vexé.
« C’est justement parce que je suis petit, que je sais que la seule façon de se faire des amis est d’être gentil avec les autres. »

Justin songe toute la journée à ce que lui a dit l’agneau.
« Comment être gentil avec les gens s’ils ne veulent pas vous parler ? » gémit-il à haute voix.
Un moineau l’entend, et lui adresse ce conseil.
« N’attend pas que les gens s’intéressent à toi pour être gentil avec eux, voilà tout ! »

Justin décide alors de suivre les conseils de l’agneau et du moineau.
Il aide les vieilles dames chiens à traverser la route.
Il se mêle d’une dispute entre deux chiens, et les convainc de se réconcilier.
Il aide à se libérer une jeune dalmatienne, qui s’est emmêlée les pattes dans sa laisse.
Il partage son os avec un chien mal nourri par son maître.
Etc…, etc…

Et ainsi, pendant une semaine, Justin fait le tour des fermes en apportant son aide…
Sans jamais se présenter.
Bien sûr, tous les chiens du voisinage commencent à se demander qui est ce chien mystérieux, qui est si gentil avec tout le monde.
Et bien vite, ils apprennent dans quelle ferme il vit.

Un beau jour, tous les chiens vont à la ferme de Justin.
« Mais qui es-tu, toi qui es si bon ? », lui demandent-ils.
« Je suis Justin Chien », répond Justin.
Mais cette fois-ci, personne ne se détourne.
« Mais non, tu es bien plus que cela ! » disent les autres chiens.

Justin peut enfin leur expliquer que Justin est son prénom, et qu’en effet, il n’est pas « juste un chien. » Puis il leur raconte ses mésaventures.
Tous les chiens se retrouvent confus de l’avoir ignoré pendant si longtemps. Ils comprennent que quelqu’un n’a pas besoin d’être « exceptionnel » pour que l’on s’intéresse à lui ! Et que la télévision les a donc induits en erreur !

Ainsi, aujourd’hui, Justin Chien a beaucoup d’amis chiens.
Il s’est même marié avec la jeune et jolie dalmatienne.
Ils ont eu de jolis petits chiens… et ils ont bien réfléchi avant de choisir leurs prénoms !

C’est depuis cette époque que les chiens ont compris que la télévision enseignait beaucoup d’âneries, et qu’ils ont cessé de la regarder.

Si tu ne me crois pas, vérifie autour de toi : as-tu déjà vu un chien regarder la télé ?
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