23 avril 2009

Les adultes sont des cons !


Nous étions jeunes, nous avions vingt ans et tous nous avions décidé de faire de la création artistique notre vie.

La création artistique, nous en savions encore peu de choses, nous la découvrions à peine. Mais s'il y a une chose que nous savions, malgré notre (immense) arrogance, malgré notre (immense) naïveté, c'est qu'elle nous coûterait cher, qu'elle exigerait de nous bien des sacrifices.

Nous étions jeunes et tous paumés mais tous autant que nous étions, nous savions bien que c'était là notre vocation, qu'il n'y avait pas d'alternative possible, comme un destin qui ne nous demandait pas notre avis. C'était quelque chose d'irraisonné et de déraisonnable et ça le serait toute notre vie. C'était tout simplement plus fort que nous.

Il y avait quelque chose à chercher, une magie, une vérité peut-être, et nous devions chercher jusqu'au tombeau s'il le fallait (et il le faudra).

Nous étions jeunes mais aussi très vulnérables. Sortis du lycée ou à peine, découvrant la vie mais la sachant déjà difficile. Et nous aurions alors tant eu besoin du soutien de nos aînés.

Les adultes, nos parents, leurs amis, nos professeurs parfois : tous ou presque s'étaient passé le mot : il fallait nous décourager. Et ainsi ils nous apprirent (premier mensonge) que dans l'art il n'existait que deux alternatives, sans rien au milieu : le succès (la richesse et la célébrité) ou l'échec (une misère noire, absolue). Ils nous apprirent ensuite (second mensonge) que la première de ces options nous était inaccessible car nous n'étions pas assez doués et que seule la seconde, dans toute son horreur, nous attendait. Ils nous apprirent enfin (troisième mensonge) que nous étions en train de foutre toute notre vie en l'air et que (quatrième mensonge) nous le regretterions ensuite, avant d'ajouter (ultime et affreux mensonge) que nous pourrions faire autre chose, renoncer à créer, faire des études « normales » et aller ensuite au bureau tous les matins sagement, sans regrets, pendant que d'autres cherchaient ce que nous avions renoncé à chercher. Et être parfaitement heureux comme ça.

Certains d'entre nous ont en effet renoncé en cours de route. Ceux-là se sont rendus compte que la sécurité était une condition essentielle à leur bien-être (et qui peut les en blâmer ?) et que « chercher » n'était finalement pas si important. La plupart de ces gens étaient sincères dans leur désir de création, mais ça n'était pas si essentiel pour eux. D'autres ne cherchaient que la gloire et eurent vite fait de comprendre que la gloire, dans ce métier, est une notion toute relative et très coûteuse. Eux aussi renoncèrent vite.

Mais beaucoup d'autres sont toujours là. Ceux qui ne pouvaient pas faire autrement. Qui ne peuvent toujours pas. Il arrive que l'on soit tant dégoutté des concessions qu'il faut sans cesse faire au monde afin de pouvoir faire ce qu'on a à faire que nous en sommes quelques temps improductifs, mais ça revient toujours et nous replongeons de plus belle. Mais ce qui arrive surtout c'est qu'au bout du compte on ne galère plus tant que ça. On a trouvé nos voies de subsistance, nos heureux compromis, nos moyens de vivre correctement tout en restant artistes. On n'est pas millionnaires mais enfin ! Combien de gens gagnent-ils le smic en souffrant trente-cinq heures par semaine dans un bureau, dans une usine, sur un chantier ? Nos trente-cinq heures (parfois dix heures, parfois soixante-dix heures, ça dépend des semaines) ont au moins du sens ! Nous ne sommes ni riches ni célèbres, mais ce n'est pas non plus cette misère atroce qu'on nous avait annoncée.

Mais durant toutes ces années, combien d'angoisses, combien de douleurs, combien de peurs ? Combien aussi de moments de découragement ? Combien de cris ou, au contraire, d'actes désespérés pour obtenir la reconnaissance de nos aînés en dépit de nos choix de vie ? Ces choix dont nous savions qu'ils n'en étaient pas, qu'ils étaient plus forts que nous mais, contrairement à la drogue ou au crime, productifs, générateurs de rêves sinon d'humanité.

Les adultes sont des cons parce qu'à cause d'eux nous avons vécu ces années avec de la douleur et un sentiment d'échec injustifié. Parce que nous avons cultivé parfois les graines de l'échec qu'ils avaient semées en nous et que parfois nous avons peut-être échoué à cause de cela (ah, pouvoir de l'inconscient !). Ceux-là même qui prétendaient vouloir notre bonheur causaient notre malheur. Ils nous perturbaient et nous torturaient de leurs interminables, répétitives, redondantes et vaines remontrances. Nous avons plus de trente ans à présent, alors nous savons que l'erreur était leur et pas nôtre. Nous sommes heureux d'être là où nous sommes et de faire ce que nous faisons. Cette quête du beau et du sens qui nous anime est une chose merveilleuse. Y renoncer eut été folie. Mais combien de nuits blanches avant d'en arriver là ?

Les adultes sont des cons, mais maintenant c'est nous les adultes. Ne faisons pas subir cela à nos enfants.

17 avril 2009

On a décidément beaucoup à apprendre des enfants !

Et bien oui, voilà une petite fille qui pourrait m'en remontrer sur le plan de la dramaturgie :



(Merci à .R.僕は神ですレヤンとういいます^^ qui m'a fait découvrir cette vidéo.)

(Oui je sais, j'ai des amis qui ont des noms bizarres. À la fois... je suis fan d'un type qui s'est fait appeler O(+> pendant six ans alors je suis plus à ça près ^^)

16 avril 2009

L'histoire de ma vie (à part que j'ai jamais été peintre)...

« J'ai été un peintre, un écrivain... J'ai flirté avec la politique. Je me suis fait quelques ennemis... Mais, hé ! Ils se sont tous volatilisés en poussière et je suis toujours là. Alors je suppose que ça veut dire que j'ai gagné. »

Peter David, Fallen Angel.

14 avril 2009

Saturation

Meeeeeeeeeeeeeerde !!!

Nous y revoilà : j'ai encore dépassé le nombre de Dunbar !!! Ce n'est pas la première fois et le résultat est toujours le même : mon néocortex est en train d'exploser et je ne me souviens plus de rien ni de personne :-(

J'arrête de sortir pendant quelques temps, vous ne m'en voudrez pas, hein ?

7 avril 2009

J'ai déterré un ÉNORME os à moelle !

Le texte ci-dessous est constitué d'extraits de Mémoires d'un jeune garçon dérangé, en l’occurrence ma première tentative de roman, en 1991-92 (j'avais quatorze-quinze ans). J'avais été marqué par La nausée de Jean-Paul Sartre, roman sur l'ennui dont le protagoniste ressasse sans cesse les mêmes idées noires. Il y avait aussi un petit peu de Marcel Proust : j'avais essayé de lire et abandonné au bout de cinquante pages Du côté de chez Swann, mort d'ennui devant ce que je percevais alors comme d'interminables lamentations de l'auteur sur son enfance. Étrangement, ce livre m'influença néanmoins. Je crois aussi que le roman Cripure de Louis Guilloux m'avait quelque peu influencé mais je ne puis l'affirmer (le souvenir de ce roman est très flou pour moi). Le titre, enfin, était une allusion non voilée aux Mémoires d'une jeune fille rangée de Simone de Beauvoir. Frédéric Beigbeder - dont j'ignorais alors l'existence - eut la même idée que moi avec à peine une longueur d'avance, publiant ses Mémoires d'un jeune homme dérangé en 1990. Comme quoi les grands esprits se retrouvent ^^.

Mémoires d'un jeune garçon dérangé était bâti sous la forme d'un roman épistolaire, à la première personne et à sens unique (on n'avait jamais les réponses, si tant est que réponses il y eut) : le « héros », âgé de seize ans et élève de seconde, écrit tous les deux ou trois jours à son meilleur ami, qui a quitté la ville avec sa famille. Chaque paragraphe correspond donc à une lettre - j'ai signalé les coupes dans le texte par des (...) mais très souvent, il manque aussi le début et/ou la fin du paragraphe, ce qui n'est pas indiqué. Le narrateur, non-nommé, vit avec son père, sa mère et sa sœur (tout aussi anonymes - les autres personnages ne sont d'ailleurs désignés que par leurs initiales). Leur famille, bourgeoise, a subi les effets d'une crise économique et a vu son niveau de vie baisser considérablement. Le protagoniste était en réalité un anti-héros : tout était mis en œuvre pour le rendre antipathique, prétentieux, amer, délirant et au bout du compte détestable. À travers ce personnage torturé et cette famille névrosée, c'est toute l'amertume de mon adolescence qui s'exprimait, avec rage et violence.

Le roman, jamais achevé, manquait cruellement d'une direction, d'une structure et d'une dramaturgie définie. C'était tout ce qu'on peut attendre d'un adolescent de quatorze ans qui fait ses premières armes : un charabia laborieux. Pourtant, en le relisant, je lui ai découvert une vertu totalement involontaire : je me suis retrouvé plié de rire à la lecture de nombreux passages. Il faut mesurer que j'ai écrit tout ce qui suit avec le plus grand sérieux. À la relecture, j'étais hilare comme je ne l'ai pas été depuis longtemps. Paradoxalement, j'ai aussi trouvé ça triste, trash et terriblement sombre ! Alors je sais pas... Peut-être que, comme moi dix-huit ans après les faits, vous vous en paierez une bonne tranche (je vous le souhaite en tout cas). 

J'en appelle également à votre indulgence : je ne prétends pas que ce qui suit ait la moindre qualité littéraire, c'est juste un témoignage intéressant de mon parcours artistique, qui m'a suffisamment amusé pour me donner envie d'en partager quelques extraits. C'est aussi une redécouverte, parce que je n'avais jamais relu ça et que je ne m'attendais pas du tout, mais alors pas du tout à rire autant (voire à rire tout court). Et je ne me souvenais pas non plus que c'était si acide, si noir, ni d'une telle démesure. 

Une dernière chose : j'ai vraiment fait des coupes sombres (Il doit rester 10% du texte) alors ne vous prenez pas la tête avec les informations qui vous manquent : prenez les extraits comme ils viennent, c'est amplement suffisant....


MÉMOIRES D'UN JEUNE GARÇON DÉRANGÉ :

« Je méprise presque tout le monde car les gens à la fois intelligents et sages sont rares et les autres ne sont pour moi que des êtres insignifiants et des vermines humaines ! »

« Le drame survint deux jours après, le 16 novembre 1990, autour de 12h45 : C., R. et D. se moquèrent de moi alors que S. était à côté. De la haine que j'eus pour eux, je compris que je l'aimais d'un amour absolu et qu'elle serait la seule dans ma vie. Trois jours plus tard, après avoir dans ma rage tabassé onze mecs qui me cherchaient des noises, dont une bande d'élèves de sixième (...), dont l'un d'entre eux que je tuai presque (leur chef), je décidai de me suicider si S. ne voulait pas de moi. »

« Enfin, je lui parlai pour le première fois :
- Je suppose que tu es au courant de tout ?
- Oui.
- Et alors, qu'est-ce que t'en penses ?
- Rien.
Et elle partit. Autant te dire que j'étais anéanti, aussi je décidai de ne plus attendre et de me suicider le samedi suivant. »

« À la fin de l'année, j'ai tout fait pour tomber amoureux d'une fille : L.B., mignonne, sympa, etc. Rien à faire !!! »

« En 1999, comme l'a annoncé Nostradamus, un autre Envoyé va arriver (…) Il provoquera une guerre nucléaire qui décimera plus de 95% de la population. Or il fallait quelqu'un pour s'occuper des survivants et les amener enfin sur la voie de la sagesse. S. et moi devions procréer et créer une nouvelle race. Inutile de te dire que c'est nous et nos enfants qui aurions du guider les survivants. (…) Nous nous sommes rencontrés trop tôt. »

« Nous reverrons les C. dimanche (si tu savais comme je m'en fous !) »

« Hier soir, avant de me coucher, j'ai tenté de me trancher les veines. Non pas pour mourir, comme les deux dernières fois, mais pour boire mon sang. Ceci dit, je ne suis pas arrivé à m'entailler suffisamment alors que lors de ma dernière tentative de suicide, le sang a fait une vraie flaque. C'est étrange. »

« Par ailleurs, je n'ai pas cessé d'emmerder Père aujourd'hui, je ne sais trop pourquoi. »

« Mère a piqué sa crise parce que je suis parti avec le peu d'eau minérale qui restait. Père est venu la récupérer et j'ai refusé de partager ce qui restait : j'ai tout rendu, quitte à boire de l'eau du robinet et puisque c'est comme ça je ne boirai plus jamais de leur eau, j'en achèterai moi-même et comme ça ils n'auront plus qu'à fermer leurs gueules ! Mais qu'ils ne viennent pas m'en mendier s'ils en manquent : ils n'en auront pas une goutte !!! «

« Avant de passer à mes réflexions d'aujourd'hui je vais faire suite à l'affaire de la bouteille d'hier soir. Père m'a dit que Mère lui avait fait la gueule toute la journée parce que (primo) il aurait fallu qu'il râle quand j'ai pris la bouteille et pas un quart d'heure après et (secundo), connaissant mon mépris envers les gens qui perdent leur sang froid, Mère craignait que je ne la prenne pour une conne. Aussi, étant donné (primo) que Mère était innocente et (secundo) que Père avait raisonnablement été humilié par sa faute et (tertio) que Père m'avait lavé de toute culpabilité et (quarto) que Mère me l'a demandé : j'ai considéré que je pouvais leur prendre de l'eau – ce que j'ai fait – sans entacher mon honneur »

« J'ai également pu voir le rectangle de mousse sur lequel je dormirai : ma pièce n'est pas assez grande pour y mettre un vrai lit. (…) Sœur et moi avons pris la décision d'adopter un hamster. »

« Ce soir je vais tester mon nouveau « lit ». (…) Sinon, rien de particulier. C'est vendredi soir qu'on va chez B. et cette triple-buse de Père a comme toujours fait le contraire de ce qu'on voudrait en émettant quelques contestations quant au fait que l'on voie les A. dans onze jours (quel âne !) Heureusement, Mère - qui est plus futée - a rattrapé le coup en plaidant en ma faveur. Bien qu'elle n'ait sans doute pas deviné ce que Mme. A. représente pour moi, elle a bien compris que je l'aimais bien et qu'elle pouvait m'aider. »

« Ensuite j'ai loué douze cassettes vidéo et on est rentré. (…) Je m'étais couché lorsque j'ai vu une lumière intense passer à travers mes volets puis ça s'est arrêté. (…) Il s'est avéré que Père a déclaré que je racontais des histoires abracadabrantes et que Mère et moi avons chacun de notre côté pensé à un ovni. (…) Va savoir... Ovni ou non, c'est quand même bizarre ! »

« Ah oui ! Pour finir : l'eau de toilette de la comptable de Père sent la bave d'escargot ! On aura tout vu !!! »

« En cours de sport, mes camarades faisaient les cons alors que j'étais calme dans mon coin et la prof m'a demandé si je ne les trouvais pas tarés. J'ai répondu (je cite) : Non, je le suis aussi et puis vous savez, j'ai été comme eux dans le temps. »

« Rien de neuf sur rien aujourd'hui, sinon que j'ai promené Pyrame en ville et on a vu un bébé lévrier nommé Gaston (Pyrame est le lévrier de Mère). »

« Ça y est, c'est fini... et c'est terrible ! C'était le dernier épisode. Je me suis battu pour ce feuilleton : j'ai fui de chez moi pour me réfugier chez Grand-mère, j'ai gâché ma dernière soirée à Nice et un repas dans une crêperie à Dijon, j'ai même utilisé la télé de B. ! Tout ça pour que ça soit... fini ! Et de quelle manière ? C. possédé par B. : c'est MONSTRUEUX ! Et tout le reste, cette fin... On ne sait rien de la suite : B. épousera-t-il S. ? B.H. est-il mort ? Que va-t-il advenir de D. et de sa famille ? Que vont faire N. et E. maintenant que N. a retrouvé la mémoire ? J. reviendra-t-il ? A, P. et A. ont-ils péri dans l'explosion ? L. s'en sortira-t-il ? A. et L. auront-ils leur enfant ? Tant de questions sans réponses ! (...) C'est trop affreux. Et C., le héros, finir ainsi... Si encore il était mort mais ça !!! On était sûr d'un happy-end, ça ne pouvait être autrement... mais non... le vide... C'est comme être marié avec quelqu'un ou élever un enfant puis ne plus rien savoir de lui, du jour au lendemain. On se sent mort, vidé, sans raison de vivre... J'en ai pleuré, de cette fin si horrible, du simple fait que ce soit la fin. Tout est fini, et moi je crois l'être aussi. »

« Sœur a dit LA chose à ne pas dire au cours d'une querelle entre nous. Elle l'a dit. LA chose. (…) Mère s'est empressée de clore l'affaire d'un « Fille, je te prie de garder tes réflexions pour toi ». Et pan, dans les dents ! De toute façon, Sœur a dit ce qu'il ne fallait pas et ça se paiera... Peut-être de son vivant et en tout cas les Tourments Éternels après sa mort ! Elle y coupera pas la sale petite garce ! Une bonne nouvelle, tout de même : Père serait enfin décidé à voir les A., dans quinze jours. »

« Quant à Père, il doit appeler les A. demain. Ce monstre a osé dire une obscénité sur Mme. A., c'est immonde ! (…) Ça se paiera ! »

« J'ai été seul tout l'après-midi. Seul. Père, lui, doit appeler les A. aujourd'hui et sinon je ne crois pas qu'il y ait autre chose à signaler. »

« F. m'a demandé si j'étais allé chez le coiffeur, ce à quoi j'ai répondu que non, que je m'étais juste coiffé à l'arrache. (…) Mère a donné à Pyrame un os qui puait comme j'ai jamais rien senti : l'horreur ! Aussi ai-je dit à Mère de le foutre en l'air, ce qu'elle a fait. Par contre, Sœur ne semblait guère disposée à me permettre de voir le Top 50 (elle est tout le temps collée devant la télé) : ça ne va pas se passer comme ça !!! Père n'a TOUJOURS pas appelé les A. !!! Je vais craquer ! »

« J'ai réalisé quelque chose de terrible : je vis maintenant une existence normale. Un père à peu près normal, une mère normale, une sœur, un chien et (cerise sur le gâteau) un hamster ! (…) Je m'ennuie !!! J'ai perdu mon inspiration (temporairement j'espère), mes orgasmes ne sont plus ce qu'ils étaient, je n'ai aucun sujet de préoccupation et du coup la vie a un goût de fiel. (…) Père a appelé les A. qui ne savent pas encore si ils seront libres. Pourvu que oui ! »

« Dans trois mois c'est noël et je vais très bien. Il a plu aujourd'hui. (…) Père n'est pas rentré ce soir, de sorte que je ne suis pas plus avancé en ce qui concerne les A. On verra demain. »

« L'époux A. doit rappeler Père demain matin. À part ça, le directeur de mon lycée a téléphoné à Père pour lui dire qu'il y avait enfin des places libres à la cantine mais c'est trop tard alors j'ai refusé !»

« F. m'a demandé si je pouvais lui donner 50 francs pour s'acheter un portefeuille Chevignon et je lui ai demandé ce qu'elle me donnait en échange. Elle ne savait pas et B. m'a suggéré de lui demander de sortir avec moi en contrepartie des 50 francs. J'y avais bien pensé mais je n'osais le tenter. Finalement je me suis jeté à l'eau. Elle a hésité car elle a un copain depuis cinq mois, un certain R. qui a 25 ans et qui est néo-nazi : elle hésite à le larguer. Elle n'a pas encore pris de décision mais j'espère qu'elle dira oui. Le seul problème est que, d'après B., le R. en question serait un colosse. (…) Autre problème : F. a tenté de me dissuader. Ne lui plairais-je pas ? Me suis-je illusionné ? »

« Rien sur les A. Revenons à F. : en cours d'espagnol, elle m'a dit que c'était non pour sortir avec moi, même si je gardais les 50 francs. Du coup, je lui ai proposé de les lui donner si elle me vendait son âme. Mais après avoir hésité, elle a refusé aussi. (…) Quoi qu'il en soit elle a fini par les obtenir car j'ai accepté « pour lui faire plaisir », en échange de quoi elle me sera redevable d'une dette d'honneur. Tout est donc rentré dans l'ordre et nous restons bons amis. »

« F. est d'accord pour me vendre son âme 200 francs. Grand-père est mort ce soir, à 20h30. (…) J'ai l'impression que tout est un décor, que le lycée s'écroulera à la moindre pichenette et que F. et les autres tomberont en morceaux, comme des mannequins. (…) Ces funérailles à la con, je m'en balance ! (…) Matériellement, par contre, ça me pose bien des problèmes. (…) Je ne sais pas si j'aurai autant d'argent de poche, etc. Lui a peut-être de la chance d'être mort mais merci pour ceux qui restent ! (…) Je tombe de sommeil : c'est les emmerdes qui font ça. Bonne nuit ! »

« F. est passée à 350 francs et il y a plein d'autres mecs que ça intéresse. J'ai discuté avec elle et je lui ai demandé pourquoi elle était si bizarre (c'est sa nature, dit-elle) et pourquoi elle me parlait plus que les autres (elle est sociable dit-elle). Tout malentendu est donc réglé. (…) Grand-père se fera incinérer lundi à 9 heures du matin : je te raconterai. »

« On est arrivé à 17 heures et on s'est d'abord occupé de vider les tiroirs du bureau de Grand-père. On est ensuite allé au restaurant. (…) Après on a commencé à regarder un ou deux trucs à récupérer et on s'est de plus en plus marré jusqu'à délirer complètement. (…) Je vais récupérer une loupe, un quotidien de 1930, un crocodile empaillé, une sculpture de sapin en cristal et quelques autres trucs. Le partage est équitable. (…) La sœur de Grand-mère arrive demain matin. Elle est sympa mais ce n'est pas le moment de l'avoir dans les pattes. Père et Grand-mère ont tout fait pour essayer de la dissuader mais rien à faire. »

« Je suis allé avec Père voir le corps de Grand-père. On voyait bien que c'était un mort. On le sentait aussi. (…) Il y a eu une messe complètement ridicule et tout le monde est rentré chez soi. »

« Vendredi et samedi j'ai acheté les best-of de Phil Collins, d'Elton John et des Carpenters. J'ai également acheté ma première âme : c'est C.P., un mec de ma classe, qui m'a vendu la sienne pour 50 francs. Il a signé le contrat et j'ai payé cash. Je ne sais encore pas trop ce que j'en ferai mais ça peut toujours servir. (…) Il est vrai que malgré son intelligence relativement limitée, Sœur a de forts bons goûts musicaux. C'est étrange. (…) Idem avec Mère, peut-être - sûrement, même - pourrait-on aiguiser sa réceptivité avec de l'entrainement, et une écoute parfaite. (…) Les A. ne se sont plus manifestés auprès de Père. Je sais que l'époux ne m'apprécie guère et je pense qu'il veut éviter de me voir avec Mme. A. Je sens bien qu'il est jaloux. »

« J'ai plusieurs personnes intéressées pour la vente d'âmes. (…) Si Père mourait, je ne crois même pas que je serais très triste. Un peu quand même, c'est sûr, il m'a tout de même élevé. Mais d'un autre côté, il est ma source principale d'ennuis. (…) Je vis, je ne sais pas trop jusqu'à quand ni pourquoi je continue de le faire. Bah... »

« Je suis de plus en plus nul en maths et en espagnol et c'est inquiétant. (…) Je ne saurais redoubler une deuxième fois. Je serais obligé de me suicider sans quoi je serais déshonoré. Si ça devait arriver, je pense que je ferais ça un jeudi après-midi (je n'ai pas cours le jeudi après-midi). »

« J'ai revu Le loup-garou de Washington avec Mère et Sœur. J'ai trouvé le film mieux que la première fois mais Sœur parlait régulièrement et perforait des feuilles pour faire des confettis, ce qui faisait un raffut monstre. Bien-sûr, Mère prenait son parti et elle aussi foutait un bordel monstre en faisant entrer et sortir Pyrame de la pièce. Puisque c'est comme ça et qu'il n'y a pas moyen de regarder un film en paix, je demanderai à Père de les enregistrer et je les regarderai la nuit, seul. Quel affront pour Mère et cette idiote de Sœur ! À propos d'affront, un certain Y.A. m'en a fait un sacré au lycée. Cette vermine (…) s'est jeté sur moi et m'a touché avec de grands mouvements, or ça me rend malade quand on me tripote ! (…) J'en suis malade ! Fais-moi penser de te parler des âmes. »

« Ce matin, en cours de sport, j'ai discuté un peu avec J.S. (…) Il m'a dit qu'il avait déjà trois tentatives de suicide à son actif et il a ajouté qu'il comptait se passer aux somnifères ce soir. »

« Ah... passé luxuriant, où donc es-tu ? »

« Peut-être vais-je me suicider à la fin de l'année, selon si je passe ou non en première. D'ici là, au cas où, j'ai dit à Mère qu'en cas de décès elle devrait accomplir mes dernières volontés. (…) Je ne désire plus rien de nouveau, ni amis ni filles. Juste le temps de rêver à mon passé... (…) Je voudrais vivre et mourir à la fois, c'est peu pratique. Vivement noël, c'est dans deux mois. (…) Tant-pis si je redouble, j'attendrai et au diable mon honneur. Je suis sur-intelligent et ça me suffit, les autres peuvent crever ! »

« Mère a tout de même refusé de jurer sur la tête de Sœur que j'étais normal. Elle ne peut être sûre à 100%. »

« Mère m'a donné une carte postale représentant un mec et une fille et censée faire allusion à moi et S. Moi ça ne m'a pas inspiré grand chose mais bon, si ça peut lui faire plaisir. (…) Tiens, pendant que j'y suis, je vais t'expliquer la nature exacte des âmes par rapport à nous. (…) Ce que n'importe quel scientifique te confirmera. (…) Celui qui meurt gâteux retrouve sa fraîcheur d'antan, celui qui meurt amnésique retrouve la mémoire, l'idiot devient intelligent. (…) L'après-monde est tout simplement une « autre dimension » dont les ondes électro-statiques, magnétiques et énergétiques coïncident avec celles des âmes et les attirent par des « portes » inter-dimensionnelles. (…) Il va de soi que les animaux ont également une âme. Voilà, tu sais tout. »

« Il m'arrive de me demander si je reverrai Mme. A. un jour, pas toi ? »

« F. m'a demandé pourquoi je serrais les mains des filles au lieu de les embrasser. Je lui ai expliqué que je n'aimais pas trop les contacts physiques et que je ne voyais pas l'intérêt d'embrasser les gens sur les joues. »

« Commençons par Mère et Père : leur vie sexuelle est aberrante ! Il y a un an je trouvais un vibro par hasard dans leur chambre. Il y a trois mois, Père me disait qu'il n'avait jamais pu jouir en même temps que Mère, ni même la faire jouir en la pénétrant. Il y a une autre méthode mais il refuse de ma la dire. Quelques jours après je tombe sur un AUTRE gode ! Le premier coup, j'avais cru à une fantaisie mais là j'ai pigé. Mère carbure au vibro ! En deux mots : Père se masturbe avec le corps de Mère et Mère se masturbe au vibro. C'est dingue, non ? Il faut dire qu'à ce que m'en a dit Père, le premier mari de Mère ne couchait avec elle qu'une fois par mois environ et elle était obligée de se caresser et de se doigter régulièrement pour se contenter. Penser qu'au 20ème siècle il y a encore des gens qui en sont là ! En plus, après le sexe, Père et mère vont se laver. Moi je m'en fous mais je trouve ça mieux de tout laisser sécher et de s'endormir là-dessus (…). Enfin, à chacun ses habitudes, hein ? (…) Mère râle après moi parce que je ne me trouve pas beau. (…) Pour l'instant en tout cas je n'ai pas la moindre envie d'être beau. »

« D'ici cinquante ans, l'Envoyé de 1999 aura peut-être annihilé la civilisation : qui sait si la télé existera encore ? (…) Ça ne m'intéresse plus de grandir. Mon esprit a déjà atteint son évolution maximum et je me fiche de mon corps. Tu penses que je devrais voir un psy ? En tout cas je ne pense pas que cela soit utile. »

« Père et Mère sont absents ce soir. (…) Je leur ai laissé un mot : Je ne vous ai pas attendu, non pas parce que j'avais sommeil mais parce que le sommeil est préférable à l'ennui, ennui qui amène finalement la déprime. Demain, je commence à 8 heures, comme d'habitude. Ne me souhaitez pas mon anniversaire demain matin : vu les circonstances ce serait ironiser avec ma vie et mes problèmes et c'est un droit que je me réserve. Bonne nuit. »

« Avant-hier soir, dans Nulle Part Ailleurs (sur Canal +), l'invité était un surdoué et hier matin, ceux de ma classe m'ont dit que j'étais aussi intelligent que lui. Je l'ai nié car bien que possédant un Q.I. très supérieur à la moyenne, je n'ai sûrement pas celui du gars de la télé (…) Penser que ça fait plus d'un an que C., T. et R. sont venus chez moi pour mes 16 ans, qu'on est allé au magasin de farces et attrapes et qu'on a aspergé M. de boules puantes. (…) Je suis déprimé à mort et Mère le déplore. Je suis dans le même état que l'année dernière pendant ma dépression nerveuse. »

« Je suis plus déprimé que depuis longtemps. Mère râle pour ça, pourtant je ne vois pas de quoi elle se plaint : je suis morne, silencieux (…) et pourtant elle râle de me voir triste, je ne comprendrai jamais ces humains ! »

« Pour ce qui est de Mme. A., je ne sais pas trop quand je la reverrai. Mère cherche un moyen mais l'époux ne va surement pas nous faciliter la tâche. »

« Je me sens si supérieur, si divin. Je suis un dieu vivant, je suis différent des mortels qui m'entourent, je suis sensitif, d'une intelligence hautement supérieure, j'ai le savoir de tous les secrets, contrairement à vous les humains je ne suis pas né par hasard. (…) Et si j'étais fou ? (…) Mais si c'était le cas, aurais-je des doutes ? Ne serais-je pas aveuglé par ma démence ? »

« Je suis fatigué ce soir. J'ai dormi avec Pyrame hier soir. »

« Pourquoi crois-tu que je dors avec Pyrame chaque nuit ? (…) Il n'y a qu'auprès des animaux que je peux encore trouver cet amour qui me fait tant défaut. »

« Mon amitié avec N. est menacée. (…) J'ai oublié chez lui la cassette no. 35. (…) N. l'a perdue ! Je lui ai dit que s'il ne l'avait pas retrouvée d'ici lundi, je ne voulais plus entendre parler de lui. Il a tenté de me dissuader mais rien à faire : la no. 35 est sacrée ! (…) Je me soulerais bien la gueule avec un peu de lait, en fait. Mais Père va encore me tomber dessus. Alors je vais rester assis sur cette chaise et attendre... attendre... attendre... »

« N. n'aurait toujours pas trouvé la no. 35. »

« Mais maintenant je suis seul. Personne à qui me confier. Seul, exilé. (…) Et N. qui n'a toujours pas retrouvé la #35 ! Je sais ce qui m'horrifie ici : c'est ce vide, cette fatalité. Je sais toujours ce que sera demain. (…) Mon monde est sans substance, il me semble que je vais éclater. (…) Je me vois pris entre les quatre murs de ce cagibi qui me sert de chambre, je me vois incapable de quoi que ce soit (…) Il m'est impossible de faire quoi que ce soit d'important. (…) Et demain il va falloir retourner dans cet affreux lycée. (…) Peut-être que je ne vais pas me coucher et passer ma septième nuit blanche, on verra. »

« Avant tout il faut que je te raconte le truc dément qui m'est arrivé ce matin. Quand je suis sorti du cours d'espagnol j'ai vu un slip sale au pied de ma table, autant te dire que j'étais plutôt déconcerté. Et puis j'ai compris : ce matin, en changeant de slip, le sale a du s'accrocher au cartable d'un élève, de sorte qu'il a traversé toute la ville avec un slip sale dans le dos, et arrivé au cours, le slip sera tombé au sol. C'est la seule explication que j'aie pu trouver à la présence d'un slip au pied de ma table. (…) Il n'est pas très courant de voir des slips sales dans des salles de classe. »

« La prof de sport m'a dit que j'étais bizarre. (…) C'est noël dans une semaine, n'est-ce pas sublime ? »

« J'ai ENFIN acheté son âme à S. Cette petite fantaisie m'aura quand même coûté 350 francs mais bon... (…) C'est un vieux rêve que j'ai depuis des années et je suis très satisfait de l'avoir fait, malgré ces 350F »

« Le surveillant général, Monsieur L., m'a convoqué dans son bureau pour me demander si je ne faisais pas des achats au lycée. J'ai tout de suite compris qu'il s'agissait des âmes mais j'ai nié jusqu'au bout. J'appris plus tard que les parents de P. avaient rendu les 50 francs à Monsieur L. À la récré, F. fut convoquée à son tour mais nia avoir vendu la sienne et fut crue. Je fus moi-même re-convoqué et je crachai le morceau (sauf pour F.) (…) Il étudia alors avec moi le côté philosophique de la chose et nous tombâmes d'accord sur certains points. Ce sur quoi il me fit signer un papier affirmant l'annulation de l'affaire. Vendredi, je récupérerai mes cinquante francs et délivrerai le contrat que P. m'a signé en échange. L'affaire est donc close. »

« Et en plus Mère et Père n'arrêtent pas de faire chier, de me miner... Merde, à la fin !!! Comme si je n'étais pas assez mal comme ça, il faut qu'ils en rajoutent ! Quand je pense qu'il y a un an nous étions un mercredi ! »

« Combien de fois n'ai-je pas aimé des mortes ? Qui sera tombé sous le charme de M.A., matricide qui se suicida dans sa cellule en 89 ? »

« On ne devrait pas dire « faire l'amour », c'est un terme tellement erroné. On ne fais pas l'amour en s'accouplant. On fait du plaisir et des gosses. »

« Ce soir, Mère m'a enfin dit ce qu'elle avait après moi : elle me reproche de ne pas lui proposer mon aide pour la vaisselle et les conneries comme ça. Elle croyait que j'y pensais mais que je m'en foutais. Pas du tout, l'idée ne m'effleurait même pas ! Maintenant je lui proposerai ce qu'elle voudra et comme ça j'aurai la paix. Elle m'a aussi dit que j'étais invivable, que tout autre qu'elle ne m'aurait pas supporté si longtemps. Ça pourrait paraître bouleversant, ennuyeux. Pour moi ça ne l'est pas. (…) Il n'y a qu'une chose qui m'a un peu fait mal : elle et Père m'avaient déjà dit qu'ils déploraient que je me tire à la fin des repas. Moi, je croyais que c'était parce qu'ils avaient envie de me voir, de me parler, que j'avais un quelconque intérêt pour eux. Mais NON ! De moi ils n'en ont rien à foutre, s'ils voulaient que je reste c'était pour les aider à ranger la table. Ils me l'ont dit noir sur blanc !!! Ça c'est quand même dur à avaler. Enfin, j'ai l'habitude... »

« En biologie, on a appris qu'un bonhomme contient cinq à six litres de sang. Donc avec un mec on pourrait faire une vingtaine de cannettes de sang de 25 centilitres. Et, le lycée contenant environ 965 élèves, on pourrait obtenir 19300 cannettes de sang. Bonjour le commerce : $. »

« Je pense sérieusement au pouvoir divin. Peut-être qu'avec le Nécronomicon ??? »

« Père, Mère et Sœur me semblent de plus en plus tarés. Normal. »

« J'en suis réduit à dormir avec le chien pour combler un peu ce vide qui m'entoure. »

« À part ça, on a eu droit à une piqûre au lycée. Je ne crains pas les piqûres. Qu'est-ce qu'une piqûre pour quelqu'un qui a l'habitude de se trancher les veines ?! »

« J'ai balancé mon carnet d'adresses dans la gueule de Père, ce après quoi je me suis senti soulagé, très bien en tout cas. »

« Alors voyons... Pour commencer j'ai découvert que toutes les autres filles de ma classe étaient néo-nazies. Cela s'accorde avec mes prévisions : ma génération élèvera des enfants de la génération de l'Envoyé de 1999. D'ici 2030 à 2050 la Troisième Guerre Mondiale sera déclarée. »

« Une bonne nouvelle tout de même : Père a réservé pour les vacances mais je n'aurai PAS de baignoire, (…) je ne pourrai même pas profiter des vacances pour me trancher les veines. Pas très pratique, tout ça. (…) Je vais essayer de baratiner Père pour avoir une baignoire, quitte à lui rembourser la différence. Tu imagines ? Pas de baignoire, pas de douche, pas de WC, pas de frigo, pas de lavabo ou d'évier : RIEN !!! Bonjour les conditions d'hygiènes. Il n'est pas dit que j'accepterai de passer quinze jours dans des conditions pareilles ! À la limite il y a de quoi me gâcher mes vacances. Je suis outragé et je me battrai pour mon confort ! Mais laissons là ces sentiments de colère et d'indignation et voyons ce que je puis te dire d'autre, c'est à dire pas grand chose, en fait. »

« D'abord, une nouvelle plus qu'inattendue : on serait invités chez les A. dimanche ! Ce serait donc enfin cette occasion tant attendue de revoir Mme. A. (…) Si je la revois car Père m'a dit : « si tu viens, c'est SANS tes lunettes noires ! » (…) Il s'agit de mon seul moyen de me protéger du regard des autres ! Bien sûr, ce n'est pas maintenant que Père va commencer à me donner des ordres mais ce serait m'abaisser que de le quereller pour si faible cause. J'ai peur (…) que l'époux n'ai monté la tête de Mme. A. contre moi. Après tout, il est son mari, et je ne suis que le fils de leur huissier : les forces en présences ne sont guère équitables. »

« Par ailleurs, Mère ne tourne pas au vibro (Père a fini par cracher le morceau). C'est (je cite) un doigt devant, un doigt derrière, la langue en renfort et tout ça en même temps. C'est la seule façon de la faire jouir. Mais ce qu'elle préfère c'est la masturbation qu'elle pratique toujours assidument. »

« Logiquement, je ne verrai pas Mme. A. dimanche, c'est dommage. »

« Un chien hurle au loin. J'aimerais bien le tuer. »

« Les jeux sont faits et les dés jetés. Mais le voile me cache encore les résultats. Qu'importe le temps. Un jour Je SAURAI, c'est inévitable et inéluctable. Il me faut la réponse. Il me la faut maintenant ! Mais comment pourrais-je jamais connaître la réponse si j'ignore la question ? Il me la faudrait tout d'abord si je veux pouvoir trouver la réponse. Mais je ne peux me permettre de chercher la question. Trop peu de temps. Pas de temps. Alors je cherche directement la réponse. Et qu'importe la question. L'aurai-je jamais avant que son intérêt ne s'efface ? L'aurai-je jamais ? »

« Demain encore mes lunettes noires me protégeront du Mal. Et demain encore je serai invulnérable. »

« Mère a quitté mon cagibi en claquant la porte, hurlant à Père que je n'étais qu'une petite ordure imbue d'elle-même, un petit salopard qu'il conviendrait de jeter à la rue sans délai. Père est resté muet, et moi je ne trouve là qu'une preuve supplémentaire de l'absence d'amour qui règne dans cette famille. Ce n'est pourtant pas ma faute si je leur suis supérieur en tout, et si je ne peux parfois m'empêcher de le leur rappeler ! »
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