Premier
voyage en Chine, septembre-novembre
2002.
Décollage
ici.
Expérience
précédente : The Lijiang Experience (Pt. 10).
07
octobre 2002 – 02 novembre 2002 : The Lijiang Experience,
Lijiang (Yunnan).
Onzième
jour. Au Photo Café, je relis Kazz,
Alchimie
et Les charognards
et autant je suis satisfait de mon roman, autant mes dernières
chansons ne me plaisent pas du tout. Je me sens prisonnier des vers
et des pieds, autant de contraintes auxquelles j'ai renoncé avec
soulagement dans le cadre de mon écriture poétique. C'est un vrai
problème : ma plume n'est pas incisive en chanson, j'y perds la
spontanéité qui donne leur tranchant à mes poèmes. Je note
ensuite mes rêves de la nuit. Dans le premier, une éditrice de
Pointe Noire m'expliquait que la sortie de Warp
risquait d'être repoussée car « la conjoncture n'est pas très
favorable » (tu m'étonnes, ils sont en train de faire
faillite !). Dans le second, j'étais sur un bateau en Chine,
mais c'était une sorte de jour férié où il était interdit de
monter en bateau, alors on était tous dans l'eau, accrochés aux
bords du bateau (une vraie galère !). Les deux autres rêves me
voient encore en proie à des gens mécontents qui me font toutes
sortes de reproches. Après cela, je potasse mon Lonely
Planet et un article m'amuse
beaucoup, qui explique le rituel post-mariage des Bai, la minorité
dominante à Dali (au Sud de Lijiang). À
peine le mariage prononcé, l'homme et la femme se lancent dans une
course jusqu'au foyer conjugal. Celui qui, le premier, se saisit de
l'oreiller sera – à jamais – le décisionnaire du
couple.
Photo : Dr. Ma Pingke |
Le
soir, je me rends à un concert de musique traditionnelle naxi. Le
spectacle est présenté par un homme de plus de quatre-vingts ans,
qui a consacré sa vie à la redécouverte et à la promotion de
cette musique (évidemment interdite par Mao). La plupart des
musiciens d'ailleurs sont très âgés, quoi que des jeunes prennent
heureusement la relève. Je ne me risquerai pas à tenter de décrire
la musique naxi, mais Youtube est votre ami. Le vieil homme nous
explique que la pratique de cette musique donne une santé de fer et
que cela explique la longévité des interprètes. Il déplore
ensuite que les jeunes Chinois se désintéressent de leur héritage
culturel et enchaîne avec une anecdote que je retranscrirai telle
quelle : « Un musicien de l'orchestre avait décidé
d'apprendre deux ou trois mots d'anglais. Lorsque des touristes
s'adressaient à lui, il disait ''Hi'', puis "Where are you
from?''. Quel que soit le pays d'origine de son interlocuteur, il
répondait ''I see'', alors qu'il ne voyait rien du tout. Puis comme
il ne comprenait rien d'autre, quoi qu'on lui dise ensuite il
répondait ''bye bye'' et s'en allait ». L'histoire, contée en
chinois puis en anglais, provoque l'hilarité du public : j'ai
sans doute affaire à un exemple typique d'humour chinois.
Les
premières notes éveillent en moi la même émotion que la ronde de
l'autre jour, quelque chose de très fort à nouveau. Je sors de là
tout à fait ravi mais vidé. Je songe que ça serait bien si le
Prague Café mettait un disque de Sting et lorsque j'arrive sur
place, Ten Summoner's Tales
est dans les enceintes. Puis je me décide sur un coup de tête :
demain je quitte Lijiang pour Dali, il est temps de repartir à
l'aventure !
En
sirotant mon Coca, je repense à mes rêves : depuis le début
du voyage, j'y ai toujours le mauvais rôle… Je cherche mais ne
trouve aucune explication satisfaisante. Dans la rue, un Occidental
blond aborde toutes les Chinoises qui passent, tente de les draguer
sans succès, de la façon la plus grossière qui soit. Il respire la
stupidité à cent mètres. En fait, il est à ce point caricatural
que je l'observe longuement, fasciné par son absence de recul sur sa
propre existence.
Et
c'est sur ce triste touriste que se termine la Lijiang Experience :
demain, je pars.
Du
moins, c'est ce que je m'imagine !
Prochaine
expérience : The Lijiang Experience (Pt. 12).
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