Premier
voyage en Chine, septembre-novembre
2002.
Expérience
précédente : The Short SteppeXperience.
29
septembre 2002 – 02 octobre 2002 : The
Ulan-Bator Experience (Pt. 3),
Oulan-Bator (Mongolie).
Je
prends de nouveau quelques jours pour me reposer et me réchauffer
dans la confortable guesthouse.
Très vite, je m'aperçois que mon adresse email est inaccessible :
le site de mon fournisseur (thedawn.com) est aux abonnés absents. Je
décide d'attendre quelques jours et de voir si ça remarche. Je
conçois aussi quelques idées pour de futurs projets. J'ai envie de
mettre une photo de Mao Zedong en Mickey Mouse en couverture d’un
futur numéro de Mercure Liquide (comme il faudra
encore deux ans pour que ne sorte le premier numéro, cette idée me
sera passée). Comme Pulsize a renoncé à faire de Small City un film, je caresse
l'idée d'en faire mon second roman pour aller au bout de la
thématique de la vie nocturne abordée dans L’incident
Œdipe (inédit). Pascal, le Suisse,
m'arrache à ces méditations afin de me présenter Mark l’Anglais.
Tous deux insistent pour que je les suive en boite de nuit !
Après trois verres de vodka, je cède et me voilà à l’UB Palace,
le plus gros club de la ville (donc du pays). La clientèle a pour
l’essentiel moins de vingt ans et se régale de mauvaise techno et
de mauvais hip-hop. De temps à autre, un « show » de
quelques minutes interrompt le mix et captive le public : deux
hommes à demi nus qui s’effleurent en dansant un slow,
un concours de celui qui boira le plus vite un litre de bière
cul-sec, des danseuses seins-nus qui gesticulent grossièrement, une
loterie dont les tickets sont nos billets d’entrée, un animateur
qui chante Happy Birthday
à ceux dont c’est l’anniversaire… Bref, nous touchons les
bas-fonds de la ringardise et je noie mon désespoir dans la vodka.
Pascal est décidé à séduire une jeune fille du cru et, comme je
n'ai pas l'intention de le suivre sur ce terrain-là, je continue de
boire jusqu’à m’en rendre malade. Je file aux toilettes et vomis
tout ce que j’ai à vomir lorsque, à peine remis, je tourne la
tête et me retrouve face à Madame Pipi, une petite vieille furieuse
qui fait irruption dans la cabine et me hurle dessus en Mongol avant
de me fourrer une éponge dans les mains. Derrière elle, un vigile
observe la scène d'un air sévère alors, tout à fait effaré,
j’éponge vaguement la cuvette et m'éclipse discrètement. Je
m’écroule ensuite sur une table et comate longuement au son d'une
techno épouvantable. Je ne sais combien de temps je reste ainsi
avachi mais à quatre heures du matin la boite ferme, et il faut
partir. Je tiens à peine debout et m'empresse de vomir tout ce qui
me reste dans les tripes sur le dancefloor.
Vomir est décidément quelque chose de très mal vu en Mongolie car
à présent, ce sont les videurs qui me crient dessus. Leur chef
m’intime de payer une « amende » de trois-mille tögrögs
(environ trois euros) et je suis prêt à leur donner tous les
tögrögs qu’on voudra pourvu qu'on me laisse en paix, sauf qu’un
Australien aussi ivre que moi s'insurge que c’est du vol et que je
ne dois pas payer, et puis voilà qu’un flic arrive et demande ce
qui se passe, alors je m'empresse d'éconduire l’Australien et de
régler ma prune, après quoi nous nous enfournons dans un taxi avec
Pascal et Mark. Pascal est aussi ivre que moi mais lui a une pèche
d’enfer, et il décrète arbitrairement que nous devons aller
manger des oushours
(des beignets au... mouton bouilli !). Dix minutes plus tard,
nous nous retrouvons hilares, en train de nous empiffrer dans un
snack nocturne pendant que vingt-deux jeunes Mongols (j’ai compté)
jouent à un doomlike
en réseau dans l’arrière salle. Je retrouve mon entrain et nous
rendons les serveuses un peu folles parce que nous re-commandons des
oushours
toutes les cinq minutes et ne cessons de faire des blagues qu'elles
ne comprennent pas. Mark, qui veut aller se coucher, nous attend dans
le taxi et vient demander toutes les dix minutes si
on-peut-y-aller-maintenant
et à chaque fois on lui répond que
non-pas-encore-viens-donc-te-joindre-à-nous-on-s’amuse-bien,
et Mark nous rappelle que le-taxi-attend-depuis-tout-à-l'heure
et nous clôturons le débat en expliquant que
le-compteur-tourne-et-il
sera-payé-pour-l'attente et
Mark repart en grommelant, et au bout d’une heure de ce manège
nous finissons par nous décider à regagner la guesthouse
mais
Mark est furieux.
Pascal
doit regagner la Suisse dans quelques jours mais il est tombé fou
amoureux de la Mongolie, où il retournera bientôt (entre temps, il
honorera un rendez-vous galant avec une Mongole rencontrée à l'UB
Palace, qui ne lui accordera au bout du compte que quelques bisous).
C'est avec plaisir que d'un mail à l'autre, nous suivons depuis nos
pérégrinations respectives à travers le monde.
Je
passe les deux jours suivants à coocooner
dans l’appartement. Il fait désormais si froid que je ne sors que
pour manger du mouton bouilli et visiter le musée d’histoire
naturelle de la ville. Ce dernier ne présente guère d'intérêt,
sinon un squelette intégral de tyrannosaure. Hormis cela, on y
trouve diverses bestioles empaillées et tout à l'allure d'un musée
du dix-neuvième siècle laissé à l'abandon. Je retrouve Monica la
Suisse, qui est toujours là, et je passe beaucoup de temps à
discuter avec des gens du monde entier. C’est aussi à ce moment-là
que j’écris le texte Vacances
(inédit),
un rap pour mon groupe Shoona Sassi qui relate mes galères de
voyage, d'Istambul à la Mongolie en passant par la Long Way Home Experience. Je
persiste aussi à faire des rêves bizarres à propos de ma famille.
Il en est un où l’on exhume le cercueil de mon grand-père décédé
en 1979 pour s'apercevoir que, vingt-trois ans après sa mort, il
respire encore, comme une sorte de vampire. Je songe également à la
suite de mon voyage. Que faire à présent ? Je dois toujours
aller à la rencontre des Miaos et des Dongs. Mais avant de me lancer
dans l’exploration de villages isolés et difficiles d'accès, je
m'offrirais bien une semaine dans un coin touristique et paisible au
Sud de la Chine, histoire de me poser un peu et de reprendre le
soleil. L’air de rien, cela fait un mois que je cours dans tous les
sens, que je m’épuise dans des villes dont on ne parvient pas à
sortir, dans des jeeps surchargées de Mongols, dans des steppes
glaciales… Et puis avec tout ce mouvement, je n’ai pas pu
travailler sérieusement à mes projets littéraires, aussi est-il
impératif que je m’arrête un peu quelque part, ne fut-ce que pour
ça. J’ai besoin d’une petite pause, d’une semaine de détente
et d’écriture. Je me décide pour le Xishuangbhanna, la région
tropicale qui se trouve tout au Sud de la Chine. J’ai presque un
continent à traverser pour y parvenir. Je dis au revoir à mes amis,
déjeune une dernière fois avec Monica et m’engouffre dans un
train pour la Chine en compagnie de Brit l’Allemande et Stéphane
le Français. Ils forment un couple sympathique mais plutôt réservé,
de sorte qu’on ne parle pas des masses. La montée dans le wagon
est une cohue épouvantable et un pickpocket parvient à me dérober
tout l’argent liquide qui me reste (vingt-cinq euros).
Prochaine
expérience : The Long Way South Experience.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire