6 novembre 2014

Confluences 3 : Antiprocrastination


je veux que tu avales la vie
je veux que tes antécédents m'enlacent la parole
je veux détricoter nos dépendances, transmuer nos ambivalences
en étuves antédiluviennes

je veux te danser hors de moi
je veux que tu m'évites dans les yeux
je veux le chaos, le bruit dans ma tête & des indécences
à n'en plus compter

je veux que nous glissions enlacés
je veux la dérive des continents & nos épices en constat d'urgence
je veux insinuer des préludes à n'en plus finir
griffonner des illusions sur ton épiderme

je veux que nous épuisions
nos réserves de choses impensables
je veux te laisser rentrer chez toi sans un mot
puis déposer des insolences
sur le pas de ta porte

je veux la liste de tes chansons
je veux le décompte de tes pluies
je veux l'étendue des dégâts, l'inventaire des petites choses
qui te font mordre l'oreiller au creux des nuits les plus noires

je veux l'entourloupe & l'ivresse
je veux bazarder les cartes en travers de la table
je veux poser mes lèvres sur les flammes &
ne plus me demander quel jour on enterrera les fruits

je veux que tu me regardes lorsque je m'épile
je veux que tu m'arraches les éclats de verre des yeux
je veux un incendie dans la baignoire & des nébulosités
jusqu'à ce que les hasards s'effondrent

je veux jeter les ignares dans des gouffres
lorsqu'ils prononceront d'autres noms que le tien
je veux te caresser au milieu d'une foule sans que nul ne s'aperçoive de rien
au point que la chair s'embrase & que nos vœux pieux
se muent en maison close

je veux te cracher par terre & mordiller tes inutilités
je veux être la photo de voyage agrafée sur le mur de ta chambre
je veux un sentiment d'urgence entre nos entrevues
une sorte d'incapacité à profiter des aubes

je veux maudire le nom du dieu qui nous a écrasés l'un sur l'autre
je veux connaître le goût d'un lendemain torpillé
je veux te laper peu à peu
jusqu'à tisser des élastiques

je veux te rendre plus coriace, éprouver ta résolution
je veux t'imposer des chemins de traverse
je veux être le somnambule qui erre le jour
& qui t'arrachera au futur


Travail élaboré en collaboration avec Séverine Rouy (photographie), dans le contexte de notre projet Confluences.

26 commentaires:

Boudune a dit…

J'ai été voir les deux sites, sans regret. Et il y a des perles dans ce texte rageur...

Anonyme a dit…

olala, le texte est SUBLIME, je l'ai relu trois fois, quelle merveille! Il est très bien écrit, très visuel en fait. "je veux te danser hors de moi" me plaisait déjà énormément (il y avait un côté "the dance" de prince), mais t' "éviter dans les yeux" & "te cracher par terre et mordiller tes inutilités, waw!
En revanche, le lien avec la photo, là... vraiment, je ne pige pas trop! Le côté je regarde de l'arrière plan et je m'approche petit à petit?!

philippe mithouard a dit…

Même pas mal!

Barbara Kruczek a dit…

Vouiii.. :)

Daphnis Olivier Boelens a dit…

Superbe !

Daphnis Olivier Boelens a dit…

N'hésitez pas à le poster sur mon mur, si vous le souhaitez. Vous avez une plume magistrale. Votre choix des mots est brillant.

Gévé a dit…

Je veux être le somnambule qui erre le jour... ça résonne bien chez moi ça aussi !

Lulu Berlue a dit…

j'adore ! vraiment !

Anonyme a dit…

très beau texte, vraiment..

Colette Philippe Morand a dit…

bravo,beau voyage que cette lecture

Cachou a dit…

"Je veux", "je veux", "je veux" .... Et comment qu'on dit, hein ? ...
Pfff ... Je balance ça parce que je ne sais que dire devant ces mots : il est MAGISTRAL, ce texte. Mais vraiment.

Bruno FortuneR a dit…

Merci Shaomi de m'avoir ramené à quelques trente ans d'ici quand la passion brûlait nos corps dans les premières années de notre folle jeunesse que je regarde aujourd'hui avec toute la tendresse de l'amour que je porte à celle qui compagne, m'accompagne. Ce texte est beau comme la foudre et je te souhaite beaucoup de bonheur.

caty hirigaray a dit…

L’amour en équinoxe d'automne. ...

Annick Perrot-Bishop a dit…

Un genre de texte que je n'ai lu nullepart. Quelle originalité, maîtrise de la langue et images inattendues.! Je suis conquise et enchantée de cette découverte. Bravo! Quel souffle poétique! (et pour mon plus grand plaisir, sans rimes! Ouf!)

b.e. Lemay a dit…

Étincelles partout et prenant dans le ventre! wow!

Marie-Cécile M a dit…

Vivre inconditionnellement !
Super texte. Aussi, un peu couteau qui entre dans des plaies anciennes...

Marie-Cécile M a dit…

Au premier regard sur la photo, j'ai cru que le chat (nous) tirait la langue.

Hammou Bouchkharhier a dit…

il faut pas trop vouloir, il n y a rien au bout du tunel

Estelle Ahier a dit…

Transcendant...

Anonyme a dit…

Très très beau ce texte!

Isabelle Janvier Conteuse Comédienne a dit…

ah ben encore un qui m'parle

DERNIER ENDORMI a dit…

Je veux que tu continues d'écrire, et, même sans support ni mots, écrire dans nos cerveaux

Mandy Rukwa a dit…

j'adore........!

Mandy Rukwa a dit…

<3 du grand Shaomi....Je veux !

Sophie Boutelet a dit…

et une superbe photo !

Denise Lassartesse a dit…

je veux jeter les ignares dans des gouffres
lorsqu'ils prononceront d'autres noms que le tien <3

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