10 août 2014

Frustration et cynisme

Bon, j'avais envie de vous parler de la Palestine et d'Israël mais ce sera pour un autre jour : aujourd'hui j'avais encore plus envie de vous parler d'un drôle de phénomène que j'observe depuis longtemps en Inde et que j'appellerai... que je n'appellerai pas, en fait.

J'ai déjà abordé ici la curieuse vision que les Indien(ne)s ont de la sexualité occidentale, à savoir qu'ils s'imaginent que les Occidentaux vivent comme dans les films pornos, s'empressant d'aller niquer le premier ou la première qui passe à longueur de journée. Bon, de nos jours il y a un peu de vrai là-dedans mais tout de même, pas que, enfin disons que c'est un peu excessif et réducteur comme analyse.

Alors ensuite il y a la manière dont les Indien(ne)s perçoivent leur propre sexualité. Il faut savoir que l'Inde est le pays le plus chaste du monde (d'après le sondage mondial annuel de Durex, les Indien(ne)s ont moins de partenaires sexuels, au cours de leur vie, que n'importe qui d'autre sur terre). Évidemment les mœurs tendent à se libéraliser dans les métropoles, au sein des classes moyennes et supérieures, mais le phénomène reste marginal et sans commune mesure avec la libéralisation des mœurs occidentale. Il est difficile pour moi, en tant qu'homme, de savoir exactement ce que les femmes pensent de tout cela : éduquées depuis l'enfance à préserver leur respectabilité, elles restent soucieuse de cela et celle qui dépasse trop les bornes sera systématiquement stigmatisée, quel que soit son milieu. Le peu de femmes avec qui j'ai eu l'occasion d'aborder la question restent donc... très prudentes. Les hommes, par contre, ne se privent pas d'aborder la question entre eux, et je suis donc davantage en position de recueillir leurs confidences.

Premier constat, l'homme indien est frustré. Je veux dire, pas frustré comme vos potes français quand ils n'ont pas réussi à tirer leur crampe depuis six mois : frustré comme un affamé du sexe, comme un enfant éthiopien sous-alimenté en 1985. On pourrait d'ailleurs envisager de réunir les plus grandes stars américaines et de leur faire de nouveau chanter We Are The World afin de recueillir des dons, d'envoyer un million de putes en Inde et de mettre un terme à la souffrance de ces pauvres garçons. Non, sérieusement, nombre d'Indiens se refusant, par dignité, à recourir à la prostitution, l'accès au sexe leur est quasiment interdit en dehors du mariage. Mais comme avec le mariage vient une série de complications interminables (belle-famille, enfants, relations entre l'épouse et la mère de l'époux, obligation de devenir responsable...), nombre d'Indiens ne sont pas pressés de se marier et alors c'est la diète. Avoir une petite amie avant le mariage est déjà difficile et réservé aux élites. Coucher avec la petite copine en question est encore plus difficile et réservé aux méga-élites. Quant au coup d'un soir à la fin d'une soirée bien arrosée, on oublie direct : ça n'existe pas. L'alcoolisme est profondément ancré dans les mœurs des Indiens célibataires et ce n'est pas pour rien : on boit pour oublier qu'on ne peut pas baiser ! Vous seriez étonnés du nombre d'Indiens célibataires que j'ai rencontrés qui boivent tous les soirs, même seuls et à la maison.

Bon, OK, voilà le topo. Du coup ce que je trouve intéressant (et triste) c'est le regard que portent les Indiens sur le sexe. Je veux dire, essayez d'imaginer que le sexe, relativement facile à obtenir pour la plupart des français, soit la chose la plus rare, la plus précieuse, la plus impossible à obtenir ? Essayez d'imaginer, ô lecteurs qui déjà baisiez régulièrement au lycée, ce que c'est d'être un jeune homme de trente ans et d'être encore vierge, ou d'avoir réussi à faire l'amour peut-être une fois ou deux dans votre vie, sur des malentendus. Essayez d'imaginer que ce n'est pas par choix que vous êtes dans cette situation, pas par vertu, mais par obligation. Le sexe alors devient le Saint Graal, le Mont Everest de l'homme indien. Du coup mes potes indiens, ben ils ne comprennent pas que nous autres Occidentaux nous ne soyons pas toujours à l’affût. Et parfois c'est agaçant. Il suffira donc de sympathiser avec une femme (indienne ou occidentale) pour que l'homme indien soit convaincu que vous n'en avez qu'après sa petite culotte. Si vous lui dites que non, que en fait vous la trouvez juste sympa, il refusera de vous croire. Si il perçoit qu'il y a une ouverture et que vous lui expliquez que vous avez décidé de ne pas saisir l'opportunité (ça arrive, des fois c'est pas la bonne fille ou le bon moment), il refusera de vous croire. Essayez d'expliquer à un gosse éthiopien de 1985 que non, ce cassoulet fumant, là, sous votre nez, il ne vous fait pas du tout envie ! Pire encore, l'homme indien interprétera à peu près tout ce que vous ferez ou direz en présence de la dite jeune fille comme une tentative de l'évincer, lui. Parce que quand la jeune fille accessible apparaît enfin, occasionnellement, comme descendue des cieux, miraculeuse, évidemment les hommes indiens seront prêts à toutes les bassesses pour la choper avant les autres. Et croyez-moi, la faim est telle que la lutte sera impitoyable. C'est donc déjà arrivé plusieurs fois que des Indiens prennent la plus innocente de mes remarques, le plus anodin de mes comportements comme une tentative de garder la jeune fille accessible (qui, en fait, ne m'intéressait pas du tout) pour moi tout seul et les éjecter de la partie vite fait bien fait. C'est super chiant et ça créé parfois des tensions franchement inutiles !

Quant à la jeune femme accessible, tombée du ciel, on pourrait penser que l'homme indien va la vénérer, la traiter comme l'être le plus précieux qu'il ait jamais rencontré ! Non, pas vraiment. C'est une fille facile : il n'a aucune estime pour elle, il est juste bien content de pouvoir la consommer. La joke étant que souvent, je vois des jeunes femmes indiennes modernes qui se permettent quelques écarts, qui vont boire ou fumer, qui auront eu quelques petits copains dans leur vie. Mais au fond, de mon point de vue d'occidental, il est évident qu'elles restent bien sages, Indiennes avant tout. Je veux dire par-là que non, elles ne se marieront pas vierges, mais elles n'auront sans doute eu que deux ou trois mecs, quatre ou cinq peut-être. On est quand même loin de mes copines françaises qui ont couché avec plusieurs dizaines de mecs avant trente ans, ça reste gentil. Mais l'homme indien interprétera inévitablement l'attitude libérée de la jeune fille comme le signe qu'elle est facile, qu'elle a eu des dizaines d'amants, qu'elle couche comme ça. Et si elle manifeste un désintérêt explicite pour l'homme indien, il sera beau joueur, viendra alors vers vous et vous dira que celle-là vous pouvez la choper (c'est supposément plus facile pour un Occidental que pour un Indien de choper une Indienne). Et là encore vous pourrez essayer de lui expliquer de la manière que vous voulez que non, elle ne va pas se jeter sur vous et écarter les jambes, qu'elle est plus « respectable » qu'elle n'en a l'air, l'homme indien ne voudra rien entendre.

Ce que je trouve bien navrant dans tout ça c'est que la frustration sexuelle a imprégné l'homme indien d'un cynisme sans fond. Dans sa lecture du monde, tous les hommes sont par défaut des crèves-la-chatte et toutes les femmes sont par défaut des vierges ou des putes. C'est assez déprimant et cela annonce aussi que la libéralisation des mœurs ne va pas forcément faire avancer beaucoup la (tragique) condition de la femme en Inde, si l'on part du principe que de bonne à tout faire elle va se métamorphoser en pute aux yeux des hommes. Mais comme je ne suis pas pour sombrer moi-même dans ce genre de généralités, j'ajouterai quand même qu'il y a aussi des hommes indiens qui ne sont pas du tout enfermés dans ce système de croyance : j'en ai rencontré (mais pas beaucoup).

Alors voilà. Demain (ou bientôt), je vous parlerai d'Israël et de la Palestine et vous pourrez m'engueuler ^^

4 commentaires:

GIBBON a dit…

En Inde, beaucoup d'hommes sont des cochons ( cochons d'Inde ? )

Marie-Cécile M a dit…

Navrant effectivement, d'autant plus que tout cela est enrobé de croyances et religions... Quand cessera-ton de croire que le sexe n'est pas une fonction vitale comme de bouffer, dormir, rire ou pleurer ?
Ça fait l'animal tout ça... que nous sommes malgré tout ce qu'on pense ! Animal malheureux avec tout ça, pfff !

Nuit de Soie a dit…

Une autre raison de leur frustration peut-être : pour cause d'avortements intensifs des fœtus féminins il y a un déficit des naissances de filles . Ceci ( la carence du produit) pouvant expliquer cela : le viol, pratiqué en groupe ou en solitaire, érigé en pratique sexuelle courante. C'est comme pour nos curés, la chasteté imposée mène à tous les excès !

Gévé a dit…

Comparer la femme à un cassoulet fumant !... Il fallait oser !

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