« Attention, à compter du premier janvier 2012, Facebook va devenir payant ! Seul moyen de bloquer cette future fonction : mettre ce message en statut avant le 31 décembre à minuit ! Si tu copies ça sur ton mur, ton icône sera bleu et ce sera sans danger pour toi mais sinon, tu devras payer ! Alors attention fais passer ce message sinon... !!! (PS: c'est du sérieux, l'icône devient bleu alors copie sur ton mur). »
« J'ai reçu un appel téléphonique la soirée passée d'un individu s'identifiant comme étant au service de France Télécom qui effectuait un essai sur les lignes téléphoniques. Il mentionne que pour compléter l'essai, je dois appuyer sur le neuf (9), le zéro (0), la touche carré (#) et puis raccrocher. Heureusement, j'étais méfiante et j'ai refusé. En contactant la compagnie de téléphone, j'ai été informée qu'en appuyant sur les touches (9, 0, et #) vous donne entièrement accès à l'individu de se servir de votre ligne téléphonique et vous lui permettez de faire des appels interurbains qui seront facturés à votre numéro de téléphone de la maison. J'ai également été informée que cette fraude provient de plusieurs prisons locales. Le service de sécurité de France Télécom demande à ce que je partage cette information avec tous ceux et celles que je connais. »
« Un garçon de 14 ans a été tiré dessus a six reprises par son beau-père, le garçon était en train de protéger sa soeur de deux ans qui était sur le point d'être violée. rien est arrivé a la petite grâce au courage de son frère. Tout cela est arrivé alors que la mère était au travail, ce brave jeune homme se bat pour la vie, mais les médecins disent qu'il ne survivra pas sans une opération. Opération qui est très chère et que sa mère ne pouvait pas se permettre. Facebook et les entreprises acceptent de faire don de 45cents pour chaque fois que quelqu'un publiera ce message sur son profil, SVP ça prends 2 secondes. »
Nous avons tous lu ce genre de messages sur Facebook, ou sur notre boite mail. Les trois exemples ci-dessus (rédigés dans un français lamentable), sont totalement faux et pourtant, je les vois se répandre comme des trainées de poudres. Sommes-nous en 1997, aux premières heures d'internet ? Non : nous sommes en 2011 ! Pourtant, le phénomène se poursuit sans cesse, j'en vois des exemples tous les jours...
Commençons – avec un peu de bon sens – par une analyse des trois messages ci-dessus :
1) Le modèle économique de Facebook est – par définition – basé sur la gratuité et la publicité. Devenir payant serait, pour Facebook, un suicide commercial (ne serait-ce que parce que d'autres entreprises, par exemple Myspace ou Google +, s'empresseraient de récupérer toute la clientèle « gratuite » de Facebook). De surcroit, Facebook ne permettrait pas à certains abonnés de conserver la gratuité, et moins encore en copiant-collant un statut (c'est idiot, et c'est surtout techniquement impossible à comptabiliser, d'autant moins que le message sera modifié et traduit en plusieurs langues). Pourtant, nombre de mes amis ont copié ce statut sur leur mur ou l'on fait suivre par mail, en toute sincérité.
2) Le second message est totalement délirant : s'il était possible de « s'approprier » la ligne téléphonique de quelqu'un juste en tapant un code, la démarche la plus simple serait, pour l'opérateur, d'annuler la fonction qu'il a créée (dans quel but, d'ailleurs, la fonction aurait-elle été créée ?). Dans tous les cas, les opérateurs seraient juridiquement en tort, puisque responsables de l'existence d'une manipulation permettant l'utilisation frauduleuse d'un service payant. Pourtant, nombre de mes amis ont copié ce statut sur leur mur ou l'on fait suivre par mail, en toute sincérité.
3) Le troisième message est à peine moins invraisemblable : il est toujours impossible de comptabiliser les copier-coller de statut ou les envois de mails ; le message ne contient nulle date (le message continuerait donc de circuler cent ans après l'opération de l'enfant) ; et en outre l'affaire serait désastreuse en termes d'image pour Facebook et les entreprises concernées (le « marketing » consistant à dire que si des tas de gens copient un message, on opère le gamin, mais que si personne ne le copie, on le laisse crever et on s'en lave les mains alors que de toute façon on a le fric pour le sauver !). Pourtant, nombre de mes amis ont copié ce statut sur leur mur ou l'on fait suivre par mail, en toute sincérité.
Ouais, c'est assez fou, mais avant même de se livrer à ces petites analyses, il suffit simplement de procéder à deux mesures de vérification :
- Le texte contient-il un lien vers un site internet caritatif, une entreprise avérée, un article de presse officiel ? Si ce n'est pas le cas, on peut être sûr que le message est faux.
- Copier-coller le contenu du message en question sur Google : on sera systématiquement renvoyé vers un site du type Hoaxbuster, qui nous apprendra que le message est une farce éhontée.
D'une manière générale, tous les message « viraux » de ce genre (et je dis bien TOUS !) sont faux, qu'ils circulent par email ou sur Facebook ou ailleurs. Dans le doute, il suffit d'utiliser les méthodes de vérification ci-dessus.
Maintenant, me direz-vous, tout ceci n'est pas très grave ! Après tout cela ne coûte rien, il ne faut envoyer d'argent nulle part, cela prend deux minutes à copier-coller. Bref, on s'en fout un peu si c'est vrai ou non, ce ne sont que d'innocentes farces...
Ouh-la-la... OUH-LA-LA !!!
Ben... heu... en fait, si : c'est assez grave !
Il me semble que, dans une société d'information et à l'ère d'internet, il est vital de s'attacher à la vérification des informations que l'on fait suivre, sans quoi c'est ouvrir grand la porte à toutes les formes de manipulation de masse. Certes, on a a confiance en la personne qui a posté ce message, qui elle-même avait confiance dans la personne qui l'avait posté avant, etc. Oui, bien sûr. Maintenant, imaginons que je sois malhonnête, ou juste un peu taquin (ça arrive), ou juste un militant socialiste prêt à tout pour que Sarko ne soit pas réélu, ou encore quelqu'un qui est naïf et qui a cru un truc entendu ici ou là... Je poste un message disant « Attention ! Nicolas Sarkozy a annoncé qu'il proposera, lors de son prochain mandat, un projet de loi visant à rétablir la peine de mort en France et dans l'Union Européenne ! S'il te plait fais suivre ce message afin de protéger les droits de l'homme en Europe ! ». Les gens qui me font confiance, habitués à faire suivre tout et n'importe quoi, vont s'empresser de répandre mon message. Après une semaine, cette information totalement fausse aura été reproduite à plusieurs centaines de milliers d'exemplaires et traduite dans plusieurs langues. Elle fera potentiellement perdre des voix à Nicolas Sarkozy, parce que nombre de gens qui votent à droite sont contre la peine de mort, et elle ternira l'image de la France à l'international. L'équivalent est évidemment possible à propos de François Hollande ou n'importe qui ou n'importe quelle cause et – dès-lors – l'habitude intempestive (je vois ça tous les jours sur Facebook et ça me rend dingue) de faire suivre N'IMPORTE-QUOI sans vérifier devient un véritable pouvoir de désinformation, avec de réelles conséquences politiques. Non pas pour dire qu'il faut voter Sarkozy, c'était juste un exemple, mais je vois régulièrement des gens s'enflammer (vraiment !) pour des causes... totalement imaginaires !
Et ce sont souvent les mêmes gens qui protestent contre la désinformation des médias et les mensonges des hommes politiques et des grandes entreprises, qui clament que Ben Laden n'est pas mort, que George W. Bush a commandité les attentats du 11 Septembre ou que l'on n'est jamais allé sur la lune...
Nous obtenons donc des individus polarisés entre un doute (légitime, quoi que frisant souvent la paranoïa) vis-à-vis de toute information émanant des gouvernements, médias et entreprises « officiels », mais prêts à gober toute information dès-lors qu'elle est diffusée sur internet, par un individu isolé. L'absence de jugement est totale, les informations les plus abracadabrantes sont véhiculées sans la moindre hésitation par des citoyens qui ne vérifient rien, qui ne se donnent même plus la peine de réfléchir à la vraisemblance des histoires démentielles qu'ils colportent, ni de s'assurer qu'elles sont authentiques...
Vous direz ce que vous voudrez, c'est très inquiétant...