Hier, alors que le duel Sarko/Chirac bat son plein, France 2 diffuse un documentaire sur la prise d'otage d'une école par « Human Bomb » il y a une dizaine d'années... montrant Sarko en pleine action, prenant la situation en main et jouant le rôle du sauveur : j'ai zappé en me demandant : si France 2 est un organe du pouvoir, de quel pouvoir ?
Pendant ce temps, on nous annonce que les nouvelles lois anti-échanges de fichiers sur internet prévoient, outre des amendes démesurées, la possibilité de se voir « interdit d'accès à internet ». Après le permis à points, on peut donc imaginer bientôt la connexion internet à points ! Téléchargement de fichiers mp3 : trois points en moins, consultation de sites pornos : deux points en moins, propos immoraux sur un forum : deux points en moins, échange de mails contestataires : un point en moins par mail, etc… À terme on peut donc supposer l’octroi d’un abonnement téléphonique à points, d’une redevance télé à points (vous n’avez regardé que cinq émissions de divertissement contre trente-quatre documentaires et vingt-huit émissions littéraires : quatre points en moins !), et pourquoi pas une autorisation de lire à points, avec des pertes de points si vous prêtez un livre (après tout, vous nuisez à l’industrie de l’édition en échangeant ou prêtant des livres !).
Accablant…
L'autre jour, un vieux paysan palestinien israélien raconte avec le sourire : « un matin, en 1948, des types arrivent et commencent à poser des plots ; et à peindre une ligne blanche entre ma ferme et mon champ, m'expliquant que c'est la nouvelle frontière israëlo-palestinienne. Je leur dit « Hé, vous pouvez pas faire ça, mettez-moi du coté que vous voulez mais vous pouvez pas séparer la ferme et le champ comme ça ! », et le chef me répond « Hé, c'est pas possible, on peut pas changer la carte, c'est comme ça ! ». Alors j'ai attendu qu’ils aient le dos tourné et j'ai commencé par déplacer les plots, en mettant la ferme et le champs du coté d’Israël. Ensuite j'ai effacé la ligne et je l’ai repeinte de l’autre coté. Voilà comment j'ai agrandi le pays de quelques hectares ! ».
L’autre jour (bis), je tombe sur un docu sur Tchernobyl, qui me rappelle ce site que j'ai découvert il y a quinze jours. La ville fantôme, toutes ces fermes abandonnées, me rappellent qu’il existe une autre réalité, étrange et sombre, où les morts reproduisent sans cesse des mouvements répétitifs et absurdes. Tchernobyl est l’un des rares endroits de notre monde qui appartienne aussi à l’autre, et je rêve d’aller un jour errer de nuit dans la ville fantôme, rêve brisé d’avance par la nécessité d’un permis spécial pour s’y rendre. Dans le cadre d’un projet de BD avec le dessinateur 2080, encore au stade de sa recherche primaire (mais 2080 me presse), je cherche à tisser des liens entre les photographies de Cindy Sherman et les vidéos de snuff qui traînent sur internet. Les deux me paraissent figées dans cet autre monde, et l’on se demande même si elles sont effectivement liées de quelque façon à notre réalité. Le fait que les vidéos de meurtres, de décapitations et autres amputations que l’on trouve sur les p2p soient généralement de très mauvaise qualité accentuent en fait leur aspect horrible. La pixelisation à outrance des images les rend plus sombres, leur donne l’aspect d’appartenir à la vidéothèque d’un dément qui aurait vécu dans une cave au début des années 80 (ô époque bénie des VHS pourries, qui donnaient encore plus de goût aux films gores de mon enfance). Le son déformé des cris d’agonie rend ceux-ci plus proche d’un râle inhumain sorti d’outre tombe, un peu comme ces faux cris de l’au-delà dont on nous abreuvait dans l’émission Mystère il y a dix ans. Je suis certain que les mêmes films, avec une image et un son lisses, perdraient de leur aspect épouvantable en dépit d’une vision plus précise des détails. Il y a une autre réalité. et pourtant tout ceci est réel, quoi que transformé en apparitions numériques. Que se passerait-il si tout le monde se mettait à regarder ces vidéos ? Que se passerait-il si tout le monde visitait Tchernobyl ? Est-ce que tout le monde se réveillerait d’une longue indifférence, ou au contraire est-ce que tout le monde en redemanderait ?
J’imagine déjà une situation de cette BD avec 2080, où le personnage principal (enquêtant sur une série de suicides où les victimes ont reconstitué avec minutie des clichés de Sherman avec leur propre corps) a un nouveau voisin. C’est un type bizarre, vraiment bizarre, qui passe son temps à voir les morts, et du coup à regarder en boucle des snuffs pour oublier les morts qui traversent son appartement, pour se convaincre que la mort n’est qu’une fiction numérique, qu’il est fou. Les WC du « héros » sont accolés à l’appartement du type, de sorte qu’à chaque fois qu’il va aux chiottes, il entend des hurlements d’agonie et des coups de feu. La scène, répétée deux ou trois fois, serait je pense très efficace dans un film, mélangeant effet comique et effroi. Je me demande ce qu’elle donnera en BD.
Il existe un autre monde…
Mais le notre contient ses zones d’ombre, aussi.
Pendant ce temps, on nous annonce que les nouvelles lois anti-échanges de fichiers sur internet prévoient, outre des amendes démesurées, la possibilité de se voir « interdit d'accès à internet ». Après le permis à points, on peut donc imaginer bientôt la connexion internet à points ! Téléchargement de fichiers mp3 : trois points en moins, consultation de sites pornos : deux points en moins, propos immoraux sur un forum : deux points en moins, échange de mails contestataires : un point en moins par mail, etc… À terme on peut donc supposer l’octroi d’un abonnement téléphonique à points, d’une redevance télé à points (vous n’avez regardé que cinq émissions de divertissement contre trente-quatre documentaires et vingt-huit émissions littéraires : quatre points en moins !), et pourquoi pas une autorisation de lire à points, avec des pertes de points si vous prêtez un livre (après tout, vous nuisez à l’industrie de l’édition en échangeant ou prêtant des livres !).
Accablant…
L'autre jour, un vieux paysan palestinien israélien raconte avec le sourire : « un matin, en 1948, des types arrivent et commencent à poser des plots ; et à peindre une ligne blanche entre ma ferme et mon champ, m'expliquant que c'est la nouvelle frontière israëlo-palestinienne. Je leur dit « Hé, vous pouvez pas faire ça, mettez-moi du coté que vous voulez mais vous pouvez pas séparer la ferme et le champ comme ça ! », et le chef me répond « Hé, c'est pas possible, on peut pas changer la carte, c'est comme ça ! ». Alors j'ai attendu qu’ils aient le dos tourné et j'ai commencé par déplacer les plots, en mettant la ferme et le champs du coté d’Israël. Ensuite j'ai effacé la ligne et je l’ai repeinte de l’autre coté. Voilà comment j'ai agrandi le pays de quelques hectares ! ».
L’autre jour (bis), je tombe sur un docu sur Tchernobyl, qui me rappelle ce site que j'ai découvert il y a quinze jours. La ville fantôme, toutes ces fermes abandonnées, me rappellent qu’il existe une autre réalité, étrange et sombre, où les morts reproduisent sans cesse des mouvements répétitifs et absurdes. Tchernobyl est l’un des rares endroits de notre monde qui appartienne aussi à l’autre, et je rêve d’aller un jour errer de nuit dans la ville fantôme, rêve brisé d’avance par la nécessité d’un permis spécial pour s’y rendre. Dans le cadre d’un projet de BD avec le dessinateur 2080, encore au stade de sa recherche primaire (mais 2080 me presse), je cherche à tisser des liens entre les photographies de Cindy Sherman et les vidéos de snuff qui traînent sur internet. Les deux me paraissent figées dans cet autre monde, et l’on se demande même si elles sont effectivement liées de quelque façon à notre réalité. Le fait que les vidéos de meurtres, de décapitations et autres amputations que l’on trouve sur les p2p soient généralement de très mauvaise qualité accentuent en fait leur aspect horrible. La pixelisation à outrance des images les rend plus sombres, leur donne l’aspect d’appartenir à la vidéothèque d’un dément qui aurait vécu dans une cave au début des années 80 (ô époque bénie des VHS pourries, qui donnaient encore plus de goût aux films gores de mon enfance). Le son déformé des cris d’agonie rend ceux-ci plus proche d’un râle inhumain sorti d’outre tombe, un peu comme ces faux cris de l’au-delà dont on nous abreuvait dans l’émission Mystère il y a dix ans. Je suis certain que les mêmes films, avec une image et un son lisses, perdraient de leur aspect épouvantable en dépit d’une vision plus précise des détails. Il y a une autre réalité. et pourtant tout ceci est réel, quoi que transformé en apparitions numériques. Que se passerait-il si tout le monde se mettait à regarder ces vidéos ? Que se passerait-il si tout le monde visitait Tchernobyl ? Est-ce que tout le monde se réveillerait d’une longue indifférence, ou au contraire est-ce que tout le monde en redemanderait ?
J’imagine déjà une situation de cette BD avec 2080, où le personnage principal (enquêtant sur une série de suicides où les victimes ont reconstitué avec minutie des clichés de Sherman avec leur propre corps) a un nouveau voisin. C’est un type bizarre, vraiment bizarre, qui passe son temps à voir les morts, et du coup à regarder en boucle des snuffs pour oublier les morts qui traversent son appartement, pour se convaincre que la mort n’est qu’une fiction numérique, qu’il est fou. Les WC du « héros » sont accolés à l’appartement du type, de sorte qu’à chaque fois qu’il va aux chiottes, il entend des hurlements d’agonie et des coups de feu. La scène, répétée deux ou trois fois, serait je pense très efficace dans un film, mélangeant effet comique et effroi. Je me demande ce qu’elle donnera en BD.
Il existe un autre monde…
Mais le notre contient ses zones d’ombre, aussi.
2 commentaires:
Il est terrible ce site vers lequel tu as pointé un lien.
Si tu étais plus près, tu pourrais aussi aller errer dans Oradour. Perso, je suis souvent passé à côté, mais n'ai jamais pu m'arrêter ... J'imagine que c'est le même silence, la même désolation. La même absurdité.
Bien sûr que le flou rajoute à la peur, et que le prémâchage de nos émotions les minimise ! Je suis d'accord avec ce constat, les peurs de nos adolescences en VHS laissaient plus de place à l'imagination que la HD d'aujourd'hui !
Mais j'arrête parce que je me fait l'impression d'être ma grand mère : "c'était mieux avant !" :)
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